La médiation a un rôle social essentiel

Interview du Médiateur de la Ville de Paris par le magazine A Paris

 

A Paris : Comment évolue la Médiation parisienne ?

Le recours à la médiation entre peu à peu dans les mœurs. En cinq ans le nombre de dossiers traités a augmenté de près de 60%. Cela ne signifie pas qu’il y ait plus de litiges avec l’administration qu’auparavant mais que les parisiens se tournent un peu plus spontanément vers cette solution au lieu de baisser les bras ou, plus rarement, d’aller devant le juge.

Cette évolution positive peut être attribuée à un effort de communication pour populariser la médiation parisienne. J’ai ainsi remplacé le confidentiel rapport annuel par un supplément d’A Paris distribué à 100.000 exemplaires, tandis que des messages  informatifs sont maintenant diffusés dans tous les équipements de proximité comme sur les téléservices municipaux.

La mise en avant de la Médiation fait désormais partie  des critères de certification des services QualiParis et les Directions de la Ville n’en collaborent que mieux à la résolution des litiges.

Quelle est la place de l’humain dans votre action ?

Si je me félicite que les recours dématérialisés via le site internet  mediation.paris.fr progressent, J’ai parallèlement tenu à renforcer  le nombre de permanences d’accueil physique par nos bénévoles dans les arrondissements car l’écoute directe, à l’heure du tout numérique,  demeure un besoin essentiel pour nombre de nos concitoyens.

Les parisiens que nous recevons y sont très sensibles car nous leur offrons non seulement un service gratuit et le gage d’une étude indépendante de toutes les situations personnelles, mais également un temps d’attention compréhensive et bienveillante devenu assez rare de nos jours.

Mais ne nous leurrons pas, il reste encore beaucoup de chemin devant nous pour que le recours à la médiation devienne un réflexe naturel pour la plupart des gens.

J’ai la conviction que c’est un axe essentiel de modernisation de la relation à l’usager autant qu’un moyen de renforcer la confiance des citoyens dans la démocratie locale.

Les personnes qui s’adressent au médiateur appartiennent en majorité aux catégories populaires, voire en difficulté. Un tiers d’entre-elles sont employées, un autre tiers sans travail et 20% sont retraités. Les cadres représentent moins de 5%. La médiation a un rôle social essentiel.

Le rôle du médiateur est-il efficace ?

Les recours que je reçois sont symptomatiques des difficultés que peuvent rencontrer les usagers au quotidien. Si je m’aperçois qu’un sujet prend de l’importance, ce n’est jamais anodin. La médiation comporte ainsi une dimension de veille et d’alerte qui peut m’amener à signaler à l’exécutif municipal les signes avant-coureurs de problèmes de fond.

L’examen des situations particulières qui me sont soumises aboutit dans deux tiers des cas à une décision favorable en tout ou partie au requérant  ou à un accompagnement en réorientation (si la Ville n’est pas directement concernée).Dans un tiers des cas cependant, la décision de l’administration doit être maintenue au regard du droit. Dans ce cas il est très important d’apporter à l’usager toutes les explications utiles à la bonne compréhension de la décision.

Je m’attache toutefois à formuler auprès de la Maire de Paris toute proposition que je juge utile en toute indépendance pour améliorer le fonctionnement du service public local et rendre plus efficaces ou plus justes les règlements et autres procédures municipales. Ces propositions sont publiées en toute transparence sur le site mediation.paris.fr.

Je ne peux que me féliciter de l’attention bienveillante de la Maire de Paris à l’égard de mes nombreuses propositions dont beaucoup ont été prises en compte et traduites dans les faits même si, parfois, le temps de l’Administration peut paraître long aux usagers comme à moi-même.

Comment voyez-vous l’avenir de la Médiation ?

Il me parait essentiel d’aller à la rencontre des usagers et de ne pas enfermer la médiation dans une fonction de guichet.

Cela implique d’être en capacité de nous projeter  sur le terrain pour bien évaluer les situations quand c’est utile mais aussi de multiplier les permanences de nos bénévoles dans des équipements proches des usagers comme des bibliothèques, des centres sociaux et des centres d’animation, des maisons des associations, etc.  Nous avons déjà 35 points d’accueil dans tout Paris, j’en vise une cinquantaine en 2020.

Parallèlement, je crois souhaitable de faire évoluer le service de la médiation vers plus d’indépendance à l’égard de l’administration en autonomisant son organisation et ses moyens, y compris humains.

Le statut qui a institué l’indépendance du Médiateur de la Ville de Paris a 10 ans. Je ferai des propositions à la fin de la mandature pour étendre ce principe à l’ensemble du service. En tout état de cause il importe que les évolutions à envisager puissent garantir la neutralité de l’action de la Médiation et obtenir un consensus du Conseil de Paris.

 

Crédit photo « Joséphine Brueder / Ville de Paris »